• Grâce au zèle de cet agent rustre, j'ai pu quitter Avignon de très bonne heure et j'ai progressé vite le long de la départementale, grouillante de voitures, pour me rendre à Orange.

    Orange, la passion du théâtre

    Le soleil venait d'atteindre le zénith lorsque je découvrais Orange. Ma première visite fut pour le célèbre théâtre antique. J'ai cependant en chemin aperçu en premier l'Arc de Triomphe qui m'a rappelé son confrère parisien.

    Devant ce monument doublement millénaire, l'humilité me saisit. Je me sens désarmé. mon cœur s'empreint d'une émotion grave, presque religieuse. Connaissez-vous cette expression : "Pour toute l'éternité"? Rien ne dure jamais. Je le sais de ma propre expérience. Toutes les situations humaines finissent tôt ou tard par évoluer. En bien comme en mal. Ceci est un phénomène entièrement normal. Naturel. Après tout, même les pierres solides et inébranlables d'une montagne finissent un jour par céder sous les effets de l'érosion.

    Cependant, dire que rien ne dure jamais s'avère une erreur.  Après tout, chacun de ces nombreux châteaux et monuments nés de la main des hommes ont traversé les siècles. Ils survivent à leurs créateurs et répondent toujours présent à nouvelle génération venant au monde.

    Orange, la passion du théâtre

    En comparaison à chacun de ces monuments historiques qui ornent notre planète et y resteront bien après nous, nous sommes que peu de choses. Nous ne sommes rien. Je suis rien. Un misérable grain de sable qui, bientôt, sera déplacé par le vent pour disparaitre à jamais.Pour toute l'éternité, je reposerai dans les entrailles de la terre tandis que tous ces chefs-d’œuvre que je me plais tant à admirer se dresseront fiers au-dessus de mon corps inerte.

    Pour toute l'éternité... Ainsi soit-il !

    mais arrêtons là ces réflexions qui pourraient penser croire que je suis en pleine dépression ! Je ne le suis pas du tout ! Je vous l'assure !

    Au milieu de ma contemplation, j'entends des éclats de rire. Je m'avance et découvre une troupe de théâtre amateur jouant le Bourgeois Gentilhomme sur une scène tenant sur de simples tréteaux. Le spectacle était génial !

    Après la représentation, le public se disperse et leurs réactions à rien donner me outre. J'improvise alors un parfait numéro en vantant les mérites de plusieurs comédiens que je ne connais absolument pas. Mais la foule me croit et se laisse persuader. Très vite, ce sont les enfants qui poussent les parents à verser une obole. Les adultes finissent tous par s'acquitter de leur devoir. Que voulez-vous ? Avec un peu d'intelligence, il est aisément facile de manipuler

    Alors que je m'apprête à me retirer discrètement, les comédiens m'interpellent et veulent me remercier de mon intervention qui leur a permis de réaliser une excellente recette en m'invitant à partager leur repas. Je suis gêné mais j'accepte devant leur insistance. Je les aide auparavant à ranger leur matériel puis nous partons jusqu'à une maison que leur prête l'oncle de l'un de ces comédiens.

    Au fil du travail, nous échangeons nos vies. Je leur confie voyager sur les routes et eux, en particulier Arthur, le chef de la troupe, m'apprennent qu'ils ont crée cette troupe sur FaceBook pour s'occuper pendant l'été et espère continuer ainsi pendant plusieurs années en circulant à travers al France en train pour donner des spectacles dans différentes villes comme les anciens comédiens. Quel magnifique projet !

    Au gîte, les garçons vont prendre une douche dans le jardin avec le tuyau d'arrosage. C'était super agréable et très drôle ! De véritables fous ! Après, nous avons tous mis la main à la pâte pour préparer le diner. Une parfaite équipe !

    Pendant le repas, la troupe entière s'est présentée : 

    Arthur, le chef, vient de Mulhouse et joue toujours le rôle principal de la pièce.

    Marie, une jeune fille en apparence timide, vient de Toulouse et joue les rôles d'ingénu. 

    Alexandra vient de Roubaix et est la costumière de la troupe même si elle m'a confié jouer souvent d'assez gros rôles.

    Claire vient d'un village Corse située en pleine montagne et joue les soubrettes.

    Émeline vient de Clichy-sur-bois et joue toujours le rôle de l'épouse du personnage d'Arthur.

    Nicolas, le lutin de la troupe, joue les rôles de valet.

    Parmi les autres, il y  a aussi Léo, Karim, vient d'Annecy,, et Echeziel, venant d'un petite village breton breton, se contentent eux de petits rôles et participent à diverses tâches.

    C'est vraiment une troupe splendide dans laquelle il fait bon vivre. Ils me proposent de les rejoindre. J'aurais voulu accepter mais ils sont tous majeurs et seraient responsables de ma fugue si la police me découvrais avec eux. Je leur expliqua à regret ma véritable identité. Après un court moment de gêne, nous avons repris une soirée festive qui dura assez tard.

    Le lendemain matin, je me suis réveillé très tôt pour partir, le cœur serré, avant que mes amis ne s'éveillent. Cela me déchire mais les scènes d'adieux m'attristent encore plus. Je quitte vite la ville encore plongée dans le sommeil. Néanmoins, à la sortie, une surprise m'attend; Arthur est là et s'avance vers moi. Il comprend mon départ aussi précipité, n'aimant pas lui non plus les au revoir, mais veut m'offrir une médaille de Saint-Gabriel e, m'expliquant l'avoir acheté pour chaque membre de sa troupe, que c'est leur signe de ralliement.

    Arthur.... J'ai été si touché par ton présent mais encore plus de savoir que tu m'acceptais parmi les tiens. J'ai songé, rêveur, que je pourrais parcourir la France, peut-même l'Europe, en votre compagnie une fois majeur. Je le voulais vraiment. Je sentais que cela aurait pu être ma place. mais Aujourd'hui... Aujourd'hui, je ne peux plus. Je ne pourrais jamais vous rejoindre. Pardon !

    Vous tous, si vous lisez ces lignes, continuez à jouer Molière avec le même plaisir que la fois où je vous ait vu jouer. Merci. Merci pour tout le bonheur partagé ensemble. C'était très court mais génial ! Tout au long de mon voyage, en trois mois, j'ai connu beaucoup de personnes amis je crois que c'est vous que j'ai le plus apprécié, plus encore que ma tendre Maria. Encore merci. A vous tous, je vous suis reconnaissant.

    ~~ Ambulando meus magna erit, superbia magis. ~~


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  • A la sortie de Motpellier, je m'arrêter pour établir l'itinéraire que je me dois de suivre pour parvenir jusqu'à Avignon. Voici la carte ce qui m’attendait :

    La grande cité d'Avignon

    Le moins que je puisse dire, c'est que le long de ma route, je n'ai pas connu la faim. Afin d'éviter de perdre les bonnes crêpes préparées par Elsa, j'en avalais deux ou trois à chaque pause. Et le tas a eu beaucoup de mal à diminuer ! Autant dire que mon estomac était bien rempli !

    Après deux bonnes journées de marche j'ai atteint Avignon. Au début, l'agglomération parait ordinaire puis devient exceptionnelle au fur que l'on se rassemble du centre historique. j'ai tout aperçu le célèbre pont inachevé :

    La grande cité d'Avignon

    Mais personne ne dansait dessus ! Ah ah !

    Naturellement, je me suis me rapprochée de la cité et j'ai commencé à visiter les rues. Néanmoins, ma première priorité fut de téléphoner à am mère. Il y a si longtemps que nous ne étions pas parlé. Elle manquait à un point que vous ne sauriez imaginer.

    La grande cité d'Avignon

    La grande cité d'Avignon

    J'ai également visiter le palais des Papes. Si vous l'ignorez, pendant le Moyen-Age, l’Église Catholique a connu un terrible schisme durant lequel elle a connu deux papes : un à Rome et l'autre à Avignon. Six papes se sont succédé en ces lieux après l'avénement de Clément V : Benoit XII en 1335, Clément VI en 1342, Innocent VI en 1352, Urbain V en 1362, Grégoire XI en 1370 et Benoit XIII en 1394. Je pourrais vous raconter toute l'histoire ce serait incroyablement long. Allez plutôt consulter vos précieux amis les livres !

    La grande cité d'Avignon

    Après la visite du palais, le soir commençait à tomber. J'ai commencé à chercher un lieu pour dormir mais j'ai alors découvert une attraction singulière. Sur une place, un guitariste amateur donnait un concert gratuit accompagné d'une jeune femme, vêtue en ancienne gitane, qui dansait en agitant des maracas. Peu à peu les touristes se sont rassemblés. C'était super agréable ! Nous avons dansé une bonne partie de la nuit, faisant al fête ensemble sur des airs joyeux, éloignés de tout succès moderne.

    Le lendemain matin, mon réveil fut beaucoup moins agréable. Après une très courte nuit, un policier municipal m'a tiré de mon sommeil d'une gifle qui m'a étendu au sol en m'accusant d'être un sans-abri. Je me suis défendu verbalement et réussi à l'embrouiller pour filer vite ensuite. j'ai aussitôt quitté la ville, craignant qu'il ne me recherche à me retrouver.

    Adieu Avignon ! Tu as été superbe. A présente, faisons route vers Orange !

    ~~ Ambulando meus magna erit, superbia magis. ~~


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  • En arrivant à Montpellier, je ne regardait rien. Mon esprit était bien trop préoccupé par une idée bien plus prenante : la soif. Je mourrais de soif ! En raison de ce qui s'était passé à Narbonne, j'ai oublié de procéder à mon ravitaillement si bien que mon sac est presque dépourvu de toute nourriture. Il me reste à peine la moitié d'une bouteille d'eau. Pour survivre tout le long de mon trajet, j'ai avalé les quelques fruits encore en ma possession. Ils rafraichissent la gorge et nourrissent même si cela ne vaut naturellement pas une bonne rasade d'eau.

    Double rencontre à Montpellier

    Voici mon trajet accompli ce jour-là.

    La gorge sèche, je erre d'un pas rapide dans les rues à la recherche du moindre espoir qui me donnera à boire. Ma langue est pâteuse et me colle au palais. La transpiration me coule dans la nuque et glisse le long de mon dos. Mon corps entier souffre de la chaleur et réclame à grands cris de l'eau. A boire ! A boire ! Je veux boire !

    Je pense, heureusement, que bon nombre de personnes qui liront ces lignes ne comprendront pas la sensation qui m'envahissait à ce moment-là. C'était pourtant d'une oppression si forte ! Une véritable torture ! Un supplice digne de l'Inquisition Espagnole ! Si vous souhaitez comprendre, restez au soleil une heure complète sans rien boire. Pas une fois. Je suppose que cela vous aidera à prendre conscience du calvaire qu'est la privation d'eau et combien, nous, misérables humains, en sommes totalement dépendants.

    Double rencontre à Montpellier

    Finalement, avec un bonheur inimaginable, je découvre un distributeur de boissons devant un cinéma. J'achète au hasard une bouteille et la vide aussitôt en presque une seule gorgée.

    A cet instant, je suis interpelé par deux jeunes gens de mon âge : une fille un garçon qui s'étonnent de ma grande soif. Tous deux sont roux et il est plus que visible que ce sont un frère et une sœur. En les apercevant, j'ai eu une réticence. Moi, ordinairement, si à l'aise avec les mots, je n'ose pas parler. Je redoute de montrer à nouveau méprisant et de blesser quelqu'un sans m'en rendre compte. Mais je ne peux pas fuir non plus. Les épreuves de la vie, c'est comme le cheval ou à vélo : si on tombe, il faut se relever tout de suite et remonter.

    Rassemblant mon courage, j’explique avoir marché toute la journée en essayant de ne pas évoquer de mon voyage pour ne pas paraitre prétentieux. Raté ! La vile remarque mon sac et mon apparence. Elle croit que je suis un SDF. Je suppose que le raisonnement est assez juste. J'explique, par un demi-mensonge être en fugue jusque la rentrée car j'ai eu envie de me prendre pendant les vacances pour Rémi après avoir relu Sans famille. Je suppose que j'ai inconsciemment pensé à mon petit Evan en cherchant cette excuse. La fille en est très enthousiaste et me compare à Sacha puisa joute que son frère et elle sont les dresseurs aléatoires que celui-ci rencontre au fil de sa route. Sympa !

    Double rencontre à MontpellierDouble rencontre à Montpellier

    Les présentations se font ensuite. Le garçon se nomme Marc et la fille. Il me recommande de ne pas évoquer un certain film devant sa sœur ou ce serait légèrement dangereux. Je vous laisse deviner lequel. A moins de vivre dans une grotte ou au sommet d'une très haute montagne, la réponse devrait vite fuser.

    Marc se tourne vers moi et m'interroge sur pourquoi je souhaite retourner en classe au lieu de profiter de ma liberté acquise. Malgré les tentatives de sa sœur, il soutient que le chômage existe partout et l'école ne lui apportera aucun travail. Il songe à prendre vite une femme pour faire de nombreux enfants et ainsi toucher les allocations familiales.

    Devant son rejet du système, je reste calme et essaie de trouver une idée intelligente pour le sortir de là. J'en viens à lui demander ce qu'il aime : les histoires de chevaliers. Je demande ensuite de me conduire à la bibliothèque. Là-bas, au rayon jeunesse, je déniche plusieurs romans, de différents niveaux de lectures, et suggère à Marc d'essayer de les lire.

    Au début, il est hésitant mais obéit puis, à la stupeur d'Elsa, le garçon reste plongé dans sa lecture. Eh voilà ! Lire les ouvrages que des professeurs proposent est souvent ennuyé. Lisez ce que vous, vous voulez ! Ne laissez pas quelqu'un d'autre décidez de votre vie !

    Jusqu'à l'heure de la fermeture de al bibliothèque, nous lisons dans le plus grand des silences. Le frère et la sœur me propose de venir ensuite chez eux pour al nuit en expliquant que leur mère travaille de nuit à l'hôpital et les laisse donc seuls. J'apprends à l'occasion qu'Elsa est née en Janvier 1999 et Marc, par accident, neuf mois plus tard, en Octobre.

    Double rencontre à Montpellier

    En entrant dans leur appartement, je constate que les lieux sont propres. Rien ne traine nulle part? Pas même un papier ou un emballage ! En songeant que ce sont deux adolescents vivant seuls avec une mère travaillant sans cesse, on pourrait croire le contraire mais il se révèle très agréable que contraster que jeunesse et responsabilités s'associent très bien ensemble.

    Elsa se met aux fourneaux et nous réchauffe une jardinière maison pendant que son frère cuit la viande. Le repas est délicieux. Nous faisons ensuite la vaisselle puis jouons au Monopoly. Elsa gagne et tire un plaisir immense à nous plumer. Elle jubile ensuite à compter lentement, très lentement, son argent pour nous agacer.

    Nous allons nous installer ensuite pour dormir. Marc me propose son lit. Quelle idée ! Je ne lui en priverai pas, surtout que j'ai l'habitude depuis deux mois à dormir sur un sol très dur. En comparaison, la moquette de l’appartement, c'est un matelas d'un luxe incroyable !

    Au lendemain matin, après une longue de nuit d'un sommeil ininterrompue, je me réveille sous l'effet d'une douce odeur me chatouillant les narines. je me lève et aperçois les lits vides mais surtout déjà faits. Quelle maison bien tenue ! Dans la cuisine, Elsa cuit des crêpes. Une grande pile orne la table. Elle veut que j'en emporte pour la suite de mon voyage. De son côté, Marc lui remplit mon sac de boite de conserve de fayots de fruits et de bouteilles d'eau. Ils sont fous ! Leur générosité est incroyable et si inattendue ! J'en manque de bégayer en les remerciant.

    Aujourd'hui, en songeant de nouveau à ce moment, je mesure encore plus combien mon orgueil démesuré m'empêchait de créer tout lien avec les autres.

    Ainsi, mon sac rempli de bonnes provisions, je salue avec bonne humeur mes merveilleux amis et je reprends la route. Prochaine étape : Avignon !

    ~~ Ambulando meus magna erit, superbia magis. ~~


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  • Après cette rencontre percutante avec la jeune Thérèse, mon esprit, chamboulé par cette confrontation, avait besoin de se reconstruire, d'analyser et de tirer des conclusions. Mai je n'en étais pas capable tout de suite. Sur le moment, la seule chose que j'ai faite, c'est m'enfuir.

    La renaissance de l'âme

    Voici le parcours fait de nuit entre Narbonne et Sète.

    Je sais : ce n'est pas du tout courageux. Une personne adulte doit accepter ses limites et ses faiblesses quelles qu'elles soient mais je n'en étais pas capable. Mon âme était trop secouée par les coups portées par Thérèse. Sa langue m'avait jeté à terre, rendu inapte à me défendre. Je subissais pour la première fois ce sort que j'avais si souvent infligé à ceux que je pensais qui le méritais par le passé. On dit que les gens sont châtiés par là où ils ont pêchés. Cela parait juste : j'ai péché par les mots, les mots m'assaillent de maux.

    Désireux de quitter au plus vite la ville de mon humiliation, j'ai suivi les panneaux indiquant la direction de Sète et j'ai marché presque toute la nuit. Mon esprit ne songeait à rien. Je repoussais toute idée ou souvenir qui me revenait. C'est lâche. J'en ai bien conscience. J'avançais le long d'une nationale où de nombreux véhicules roulaient, phrases allumés.

    Dans la matinée, je me suis réveillé dans Sète, l'odorat dérangé par l'odeur répugnante d'un clochard. J'étais couché en chien de fusil, juste à ses côtés. Quelle horreur ! Il puait le vin et la bière. je hais l'alcool ! Je l’exècre ! Ce n'est rien d'autre qu'un vulgaire poison, au même titre que le cannabis ou le tabac, dont on se passe très bien. Je vous l'assure : vous n'avez besoin d'aucun expédient autre que votre propre personnalité pour vous distinguer ou vous donner du courage.

    La renaissance de l'âme

    M'écartant au plus vite de ce qui restait de cet homme, je me rends jusqu'au port où j'admire avec plaisir le soleil matinal se refléter sur la mer. Ah ! Ma chère mer Méditerranée ! Comme je je t'aime ! Tu es la plus belle de toutes les mers !

    L'estomac vide, je décide pour une fois de m'offrir un petit-déjeuner dans un café et de manger en terrasse en observant la beauté éclatante de la mer. Après tout, il me reste encore beaucoup de l'argent gagné par le fruit de mon propre labeur. Je peux m'autoriser ce luxe.

    La renaissance de l'âme

    Après ce délicieux repas revigorant, j'ai choisi de quitter Sète. J'avais visité cette ville lors d'un voyage scolaire en CM2 et je m'en souvenais encore bien. Or, nous étions déjà le trois Août 2015. Mon temps devenait de plus en plus compté. Je ne pouvais plus m'accorder le luxe de trop flâner.

    La renaissance de l'âme

    Une fois la carte consultée et l'itinéraire tracé, je m'élance donc à nouveau sur les routes et là mon esprit ne peut repousser plus longtemps les doutes qui m'ont envahi. Très vite, les paroles de Thérèse résonnent en moi.

     

    Voilà exactement le genre de discours qui te rend aussi méprisable à mes yeux. Penses-tu sincèrement tes paroles ? Tu considères donc que nous vivons entourés par les idiots et que seuls quelques élus, comme toi et apparemment moi-même, seraient habileté à les dominer ? D'une certaine manière, tu aurais raison. Je suis d'accord pour affirmer que bon nombre de gens ont des conduites stupides.

     

    Ce que je vais dire à présent risque de choquer. Je m'excuse à l'avance mais ne peux vous dissimuler le fondement même de ma pensée. Je considère notre monde comme rempli d'idiots et d'imbéciles, dépourvus de la moindre volonté et incapables du moindre effort. Plus que tout, je hais ceux qui sont constamment visés à leur smartphone et l'utilisent pour n'importe quelle tâche de leur quotidien. Ces personnes m'agacent et je nourris un profond mépris pour elle.

    Cette pensée, elle était déjà en moi un an plus tôt et elle n'a pas changé. Mais mes relations avec ces gens ont évolué. Même si je suis en désaccord avec leur manière de vivre, je leur reconnais le droit d'exister et d'agir à leur guise même si leurs habitudes m'agacent. Nous vivons dans une société libre où chacun peut agir de la façon dont il ne le désire tant que nous ne montrons pas intrusif dans l'espace de quelqu'un d'autre.

    J'accepte beaucoup mieux cette idée et je peux parler avec ces gens en essayant de les traiter comme mes égaux même si je me sens toujours en esprit supérieur devant eux. Mon orgueil n'est pas facile à dompter.

    Thérèse m'a également montré une autre voie sur laquelle je pouvais m'engager :

    J'estime que ce serait une erreur d'essayer de dominer cette majorité en tentant de faire valoir les droits de notre intelligence. Au contraire, si nous sommes supérieurs à eux, nous ne devons pas être orgueilleux et considérer comme un devoir de prendre soin de ceux qui nous sont inférieurs pour leur permettre de s'élever eux aussi.

     

    Plutôt que de mépriser mes congénères, je dois devenir un pédagogue. Puisque je suis doté d'une intelligence supérieur, mon devoir consiste à aider les autres à s'élever eux aussi pour ceux-ci apprennent enfin à réfléchir et prendre conscience de leurs erreurs. Comme Thérèse peut le faire ! A la vérité, il faut m'inspirer de Socrate qui a consacré sa vie à former les esprits de la jeunesse athénienne.

    Or, Socrate n'insulterait personne. Il ne se moquerait pas non plus de gens faibles et ne les humilierait pas. Ma conduite à Narbonne était inqualifiable et indigne de l'exemple que je dois être.

    A cette pensée, j'ai songé à ce repas partagé dans la famille gérant une exploitation viticole. Ils m'avaient demandé le récit de mes aventures mais j'avais senti une gêne entre eux et moi. J'ai compris pourquoi grâce aux paroles de Thérèse lorsqu'elle a évoqué ses voyages humanitaires en compagnie de ses parents : les personnes qui n'ont jamais bougé, qui ne connaissent pas de telles expériences, ne peuvent nous comprendre. J'en ai sous doute trop dit. Par ailleurs, ma manière de raconter se révèle trop académique. Je devrais corriger ce défaut et trouver le moyen de m'adresser à une public peu instruit sans donner l'impression de leur faire cours.

    Toutes ces mauvaises manières, je l'ai doit à mon oncle. Pendant neuf ans, am mère s'est chargée de m'inculquer comment être un garçon bien élevé et à développer un esprit critique. Mon oncle a ensuite pris en charge de former mon caractère pendant quatre longues années. J'ai de merveilleux souvenirs grâce à lui qui me resteront pour la vie. Néanmoins, en contrepartie, il m'a aussi enseigné une bien mauvaise attitude dont je n'arrive plus à me séparer : mon orgueil.

    En société, mon oncle avait une attitude plus que hautaine et méprisait toutes formes de conventions sociales, ne disant les formules de politesse que par obligations. Il se montrait toujours blessant avec ceux qu'il considérait comme des imbéciles et n'hésitait jamais à exprimer de vive voix, devant la personne incriminée, le fond de ses pensées. Autant dire que sa réputation s'est rapidement établie. A chaque fois, pour se justifier, il rappelait une anecdote sur un enfant malade ou victime de la guerre rencontré lors d'une de ses aventures vécues quelque part autour du monde. Cela lui permettait de clore un débat à son avantage. Il utilisait ces mêmes histoires sur moi pour m'encourager et m'obliger à accepter les épreuves qu'ils m'imposaient.

    A l'époque, je considérais l'attitude de mon oncle normale. Je le jugeais fort et j'aspirais à lui ressembler. D'ailleurs, je suis parti en voyage dans l'idée de me confronter à son ombre qui me hante perpétuellement.

    Mais je me trompais. Mon oncle n'était pas fort du tout et je l'avais déjà dépassé quand je n'étais encore un enfant lorsque par ma politesse et ma bonne éducation. C'était incontestablement un grand explorateur et ses aventures sont incroyables. Il n'en pas moins un piètre être humain en matière de relations à l'Autre. Invoquer une histoire d'un enfant en difficulté de l'autre côté de la planète n'est pas un argument recevable. Il ferme tout débat et empêche toute réflexion supplémentaire. Nous demeurons avec l'image de ce malheureux dans nos tête. Honnêtement, je pense que c'est aussi violent que d'imposer ses idées par les poings. Nous disposons tous d'un cerveau : utilisons-le pour trouver de véritables arguments qui ouvre une discussion vers des idées nouvelles !

    A cet instant, au fil de ces réflexions, je prends conscience à quel point mon orgueil est devenu terrible. Cela me remet alors en mémoire la réplique de Darcy dans Orgueil et Préjugés :

    Jai pris à tâche d'éviter les faiblesses en question, car elles amoindrissement les esprits les plus équilibrés. Oui, la vanité est véritablement une faiblesse, mais l'orgueil, chez un esprit supérieur, se tiendra toujours dans de justes limites.

    La vanité.... C'est exactement vers là où mon orgueil, poussé au-delà des limites du raisonnable, s'est développé. J'ai peu à peu imité mon oncle et commencé à prétendre à mes congénères que j'étais leur supérieur. Cela peut être vrai mais ce serait une erreur de leur dire. Mes paroles m'apporteraient que douleur et colère. J'aurai dû le comprendre plus tôt. Durant mon voyage, après tout, lorsque je me suis lié à des gens, c'est parce que j'avais fait preuve d'une véritable gentillesse. Le curé de Chartres, mon ami historien Bernard Chaillot, le couple Mangeon, mon cher petit Evan, la singulière Agnès à Bordeaux, l’éphémère Jérôme à Dax, l'inoubliable Maria, Miguel qui m'a conduit sans me connaitre à Pampelune et m'a même offert le petit-déjeuner, la documentaliste qui voulait me proposer des sentiers de randonnée...

    A cet instant, en contemplant les souvenirs de mon voyage et surtout de mes rencontres, j'ai enfin compris mes erreurs. Je sais désormais comment je dois me comporter avec l'Autre et je me jure de ne plus reproduire une faute comme celle de Narbonne.

    La renaissance de l'âme

    Tout au long de mes réflexions, je poursuis ma route sans observer beaucoup le paysage. Mes pensées m'occupent trop. Je regarde cependant à Frontignan que je dois malheureusement dire au revoir pour la seconde fois à ma chère Méditerranée.

    Deux heures plus tard, j'aperçois les premiers immeubles de Montpellier.

    ~~ Ambulando meus magna erit, superbia magis. ~~


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  • Après quelques heures à courir en plein milieu de la végétation, j'ai fini par m'écrouler quelque part, le corps rompu par al fatigue. A mon réveil, j'ai découvert que mon lit avait été celui d'un ruisseau à sec.

    Narbonne, la défaite de l'orgueil

    Le corps encore courbaturé par mes exploits de la veille, l'estomac vide, je me suis préparé un repas avant de repartir. La route vers Narbonne est encore longue. Il m'a fallu un peu plus de trois heures afin d'atteindre la cité natale de Charles Trenet.

    Émerveillé par les premiers bâtiments que j'apercevais, je songeais que ma visite serait magnifique et inoubliable. Je suppose que j'avais alors à moitié raison. Dans mon euphorie, j'ai alors eu l'idée de chanter en pleine rue Douce France :

    Personne n'a compris ma démarche. On m'a même accusé d'être d'un SDF cherchant à mendier auprès des touristes et violenté pour m'obliger à partir ! Quel manque d'élégance ! Quel manque d'éducation ! Une pareille attitude me choque toujours autant, même un an plus tard.

    L'esprit moins tranquille, je change de quartier, bougon, lorsque de jeunes gens me bousculent de manière très cavalière sans s'intéresser à mon sort. Etendu sur le sol, j'aperçois soudain une fillette, qui me semble n'avoir que neuf ou dix ans, courir dans ma direction, un livre sous le bras, et s'arrêter à am hauteur.

    A compter de cet instant, cette séquence sera uniquement retranscrite par le truchement du dialogue avec, parfois, quelques commentaires de ma part qui seront en gras.

     

    "Je suis navrée pour le comportement qu'ont eu mes amis. Ils peuvent être... exubérants.

     

    Moi :  "Ce n'est rien. Eh, gamine, tu penses sérieusement être capable d'aider un homme adulte à se relever ? Tu es sacrément ambitieuse !

    Ah ! Comme j'ai été stupide et méprisant de m'adresser à elle sur ce ton. Je le regrette aujourd'hui.

     

    Drapée dans sa dignité, la fillette me foudroie du regard puis me répond d'un ton condescendant qui me rappelle celui que j'ai coutume d'employer moi-même.

    "Tu ne devrais pas sous-estimer ceux qui te paraissent faibles. Si tu avais lu une certaine histoire, tu aurais alors su que Goliath sera toujours battu par David.

     

    Elle fait en même temps un pas et recouvrit le dos de sa main de toute la semelle de ma basket. Je sens mon pied être écrasé et pousse un hurlement de douleur. Elle se retire, satisfaite, et me laisse ainsi découvrir un effrayant rictus jubilatoire sur son étroit visage noir.

     

    "Je crois que tu devrais désormais te souvenir de cette leçon."

    Je me relève en me montrant un peu plus humble.

     

    Moi : "Pardon de t'avoir froissé. Tu as du cran et du culot pour une gamine.

     

    "Tu me méprises encore ? Apprécierais-tu que je te nomme le vieux qui pue le bouc ? Navrée de mon impolitesse mais je pense que ton manque de correction peut l'excuser. Je m'appelle Thérèse."

     

    Moi : "Enchantée, jeune Thérèse ! Moi, je suis un noble voyageur parcourant les routes de France et de Navarre en quête d'aventures prestigieuses. Considère que je suis une sorte de chevalier des temps modernes !"

     

    Ses yeux me toisent alors avec ennui.

    Thérèse : "Veux-tu bien arrêter de me traiter en enfant ? Cela devient agaçant et même insultant. Je suis certaine que tu n'as certainement pas guère plus de vingt ans. Quant à moi, sache que même si je n'en que treize, j'entrerai dans un mois en première S."

     

    En l'entendant, je confesse avoir eu la stupidité de rire et de me moquer d'elle.

    Moi : "Toi ? En première S ? Ne prends pas tes désirs pour tes réalités, gamine ! Ah ah ! Tu as l'air d'entrer tout juste en sixième, oui ! Néanmoins, je reconnais que tu possèdes un esprit aiguisé et admirable que bien des adultes ne peuvent se targuer d'en avoir le dixième."

     

    Thérèse ouvre la bouche, outrée, mais n'a pas le temps de répliquer. Une adolescente au teint basané la rejoint et claque sa main sur son épaule. Une queue de cheval ébène dépasse de sa casquette mise à l'envers. Elle est suivie par deux garçons blonds qui sont une copie parfaite l'un de l'autre.

     

    la fille : "C'est qui ce mec, ma vieille ? Il t'emmerde ? Dis-le et je lui casse la gueule !"

    Thérèse pousse un soupir et dit :

    "Margaux... Combien de fois t'ai-je déjà expliqué que la violence ne résolvait aucun conflit ? Par ailleurs, je me débrouillais très bien sans ton aide. Alors merci de rester en dehors de cette histoire, d'accord ?"

    Margaux : "Pffft ! Après la course, j'avais envie de faire de la boxe moi !"

     

    Je tourne la tête vers  la jeune fille pour l'interroger :

    "Tu connais cette gamine ? C'est ta cousine ou ta petite voisine ?"

    Margaux :"Hein ? Tu racontes quoi ? Thérèse, c'est ma meilleure pote depuis la sixième ! Elle est super cool ! Bon... il y a dès fois où elle se joue la coincée aussi. Genre, elle veut faire une semaine avant un devoir ! Vraiment, c'est stupide ! Mais à part ça, ma copine est super chouette et trop intelligente !

     

    "En même temps, pour toi, même ton reflet doit te paraître intelligent !"

     

    Thérèse : "Ah ah ! Lucas, c'est méchant, ça ! Allons, Margaux a quelques qualités. Elle est..."

     

    L'autre garçon prend la parole avec timidité :

    "Unique ?"

     

     

    Sa suggestion crée une hilarité générale. Même Margaux pouffe de bon cœur, manifestement indifférente au fait que l'on se moque de sa personne. Je suis leurs échanges en spectateur distant tout en comprenant que la petite Thérèse ne m'a pas menti. Ces adolescents, qui devait avoir mon âge, semblaient être tous de bons camarades de classe. J'eus envie de tenter un rapprochement. Après tout, Thérèse et moi, malgré la différence d'âge, sommes du même niveau scolaire.

     

    Moi : "Pardonnez mon impolitesse alors ! Puis-je connaître vos identités ?

     

    Margaux :  "Bien sur ! Moi, c'est Margaux. Le mec costaud, c'est Lucas et le maigrichon c'est son frère Louis. Et bien sur, tu sembles déjà connaître notre mignonne petite Thérèse ! Elle a été gentille ? Elle peut être chiante avec tous ses reproches qui sortent de sa bouche ! On dirait une adulte !"

     

    Thérèse :  "Si tu évitais de faire l'andouille toutes les cinq minutes, je n'aurais sans doute pas besoin de te sermonner sans cesse. C'était quoi alors ta dernière lubie ?

     

    Margaux :  "Ah ! Bah, j'avais réussi à voler le portable de Lucas pour le mettre au défi de m'attraper ! Et devine ! J'ai gagné ! Notre grand champion est incapable de me battre à la course ! Ah ah ! C'est qui la meilleure ? C'est qui la plus forte ?"

     

    Lucas : "D'ailleurs, ta formidable meilleure amie a même trouvé l'idée de franchir une haie menant à un terrain privé et y jeter mon téléphone dans la piscine."

     

    Thérèse :  "Margaux ! Tu n'as quand même pas fait ça !"

     

    Margaux : "Ah ah ! Mais c'était amusant ! Ça m'est venu comme ça, tu vois ! Ah ah ! Je voulais échapper à Lucas et j'ai eu l'idée d'escalader la haie ! Même que je me suis écorchée les jambes ! Ah ah ! Regarde l'état dans lequel que je suis ! Ma mère va être folle ! Ah ah ! Et puis, il y avait Lucas depuis la grille qui me criait après quand le gars de la maison a débarqué ! J'ai voulu fuir mais j'ai lâché le portable ! Ah ah ! Tu vois ? C'était pas ma faute !"

     

    Thérèse : "C'est totalement ta faute ! Mais pourquoi je me fatigue? Tu n'écoutes personne !"

    Lucas :  "En attendant, comment je vais faire sans mon téléphone ? Mon père ne voudra jamais m'en racheter un ! A moins que pour mon anniversaire... Mais c'est dans quinze jours ! C'est trop long ! Louis, prête-moi le tien !"

     

    Louis :  "Dans tes rêves, oui ! Je ne me passe pas de mon portable deux semaines pour toi ! Tu veux ma mort ou quoi ?

     

    Ce point de al conversation a réveillé mon ironie. Je peux me montrer d'une profonde stupidité, que voulez-vous ? Et le pire ? Même aujourd'hui, cette réplique, je al prononcerai encore et j'en ai aucune honte.

     

    Moi : "J'avais oublié à quel point les gens sont devenus à ce points accros à leurs merveilleux outils technologiques. Vraiment... Vous êtes stupides ! Je m'interroge sur ce que vous pourriez faire si vous deviez vous débrouiller sans. J'imagine sans difficulté que vous seriez perdus."

     

    Trois des quatre adolescents tournent la tête dans ma direction. Ils sont intrigués par ses paroles. Seule Margaux serrent les poings, devinant l'insulte qui se cachait derrière mon langage. Thérèse demeure en arrière et ne me prête aucune attention. Elle  s'éloigne même du groupe. Je le regrette. Cette fille m'intéresse Elle possède de l'esprit et un formidable sens de la répartie contrairement à ce que je considéraient comme des idiots.

     

    Moi : "Savez-vous que nous avons le même âge ? J'ai seize ans et je vais entrer dans un mois en première. Je parais plus vieux, n'est-ce pas ? C'est parce que moi, au lieu de végéter bêtement tout un été et de jouer à des jeux stupides, j'ai pris la décision de voyager pendant ces vacances. Je suis parti de chez moi. J'ai fugué. Depuis je vis seul. Sans smartphone et sans utiles. Je survis par mes propres moyens. N'est-ce pas plus intéressants que vos pathétiques amusements ?

     

    Lucas : "Tu voyages à travers la France seul et sans aucun aide ? C'est... C'est génial ! Tu es un vrai héros ! C'est..."

     

    Margaux :  "Au cas où tu n'aurais pas compris, ce mec nous prend pour de la merde ! Et toi tu lui déroules un tapis rouge ? T'as fumé quelle merde exactement ?"

     

    Lucas : "Mais il a des raisons de mal nous considérer. Après tout, nos vacances sont nulles. Alors un gars capable de fuguer et de vivre seul un été... c'est génial ! Il est comme Jamie Fraser mais en vrai ! Je n'aurais jamais cru pouvoir rencontrer une telle personne !"

    moi : "Jamie Fraser ?"

     

    Lucas : "Tu ne connais pas ? C'est le héros d'une série de livres vraiment génial ! Il combat plein d'ennemis et vit des tas d'aventures extraordinaires ! J'adorerais lui ressembler ! Il a un courage que peu de gens possèdent ! C'est..."

     

    moi :  "Ah oui. J'ai lu les premiers tomes. Les histoires sont amusantes mais cela reste un simple personnage. Tu continues toujours de croire en un héros comme si tu avais encore cinq ans ? C'est pourquoi tu ne vivras jamais aucune aventures ! La véritable existence ne commence que quand tu deviens toi en te détachant de tes modèles !"

     

    Lucas baisse le regard, incapable de soutenir mon discours. A ses côtés, son frère se referme sur lui-même et semble partager les mêmes pensées pessimistes. Seule Margaux, les poings serrés, conserve une lueur combattive dans son regard ambre. Tout au long de ses répliques, son visage exprime une profonde indignation. Elle me fait sourire. Cette petite-là allait être amusante à briser.

     

    moi :  "Naturellement, cela ne signifie pas faire des choses stupides comme voler un téléphone et le jeter dans une piscine. Des personnes accomplissant de pareilles sornettes ne sont rien d'autres que de grossiers êtres immatures. Pour de telles petites gens, je tendrai à me prononcer que leur état niveau doit être équivalent à celui d'un enfant de quatre ou cinq ans."

     

    Brusquement, Margaux s'élance dans sa direction et lève le poing pour me frapper dans l'abdomen. Mon sourire s'élargit Je bloque l'attaque de la main gauche et garde captif son poignet.

     

    moi : "Ainsi tu serais aussi primitive ? Je te définissais comme un jeune enfant mais tu apparais désormais aussi sauvage qu'une Australopithèque ! Surprenant ! Mais alors... Serais-tu leur dernière représentante encore en vie ? Quelle singulière découverte ! Je me demande si je dois prévenir un archéologue ou un musée..."

    Cette condescendance.... Je me dégoûte à me souvenir de ce moment. J'ai été absolument odieux et inexcusable.

     

    Margaux :  "Je vais te crever ! Tu..."

     

    moi :  "Allons, allons, ma jolie Margaux, ne t'agite pas tant. Tu risques de te blesser, ma toute petite fille.

    En réalité, à cette époque, j'étais un jeune jeune psychopathe. Ni plus ni moins.

     

    Brusquement, un cri ferme retentit :

     

    - Lâche-la tout de suite "

    Surpris, j'écarte la main et Margaux tombe au sol. Je me retourne et découvre une Thérèse furieuse. Les bras croisés contre sa poitrine, elle  me fusille d'un regard noir.

     

    moi :  "Je pensais que tu étais parti... Mais c'est chouette d'être revenue ! J'avais envie de parler un pu plus avec toi !"

     

    Thérèse :  "Vraiment ? Dans ce cas, tu vas être amèrement déçu car je n'éprouve aucun plaisir à discuter avec toi. Je peux même affirmer que tu es la dernière personne au monde avec laquelle j'aurais envie de passer du temps. Si je me suis retournée au lieu de partir, comme je le prévoyais, c'est parce que tu t'en ais pris à mes amis."

     

    Cette répartie est absolument brillante. Cette fille.... Elle est formidable !

    moi :  "La dernière personne au monde que tu voudrais fréquenter ? Tu y vas un peu fort, non ? Il y a sûrement de nombreux individus qui mériteraient ce titre, non ? De quel droit me le confères-tu ?"

     

    Thérèse :  "Sans nul doute, il y a certainement des gens bien pires que toi mais je n'en ai encore jamais pu faire la connaissance. J'ai cependant eu l’occasion de côtoyer de nombreuses personnes. Des jeunes, enfants, des vieillards... Mais de toutes ces rencontres, tu es le seul à te comporter de manière aussi odieuse et prétentieuse. L'orgueil et la condescendance avec lesquels tu traites ton entourage me révoltent et me donnent envie de te fuir. Je préférerai passer une journée avec le pire de mes professeurs qu'une seule heure avec toi !"

     

    moi :  "Mon orgueil ? Je serai prétentieux et odieux ? Mais de quoi parles-tu ? Je m'efforce de traiter les autres avec respect même si la majorité d'entre d'eux est d'un niveau intellectuel bien inférieur au mien. Je ne peux pas non plus changer ce que je suis. Car nous vivons dans un monde d'idiots, il faudrait s'abaisser à leur ressembler ? Ce n'est pas leur rendre service. C'est à eux de s'élever et non nous de diminuer de nos capacités !

     

    Thérèse :  "Voilà exactement le genre de discours qui te rend aussi méprisable à mes yeux. Penses-tu sincèrement tes paroles ? Tu considères donc que nous vivons entourés par les idiots et que seuls quelques élus, comme toi et apparemment moi-même, seraient habileté à les dominer ? D'une certaine manière, tu aurais raison. Je suis d'accord pour affirmer juger bon nombre de conduites stupides."

     

    Elle marque une courte pause, ses yeux noirs toujours fixés dans mes iris bleus.

     

    Thérèse :  "Néanmoins, j'estime que ce serait une erreur d'essayer de dominer cette majorité en tentant de faire valoir les droits de notre intelligence. Au contraire, si nous sommes supérieurs à eux, nous ne devons pas être orgueilleux et considérer comme un devoir de prendre soin de ceux qui nous sont inférieurs pour leur permettre de s'élever eux aussi. En échange, ils ont eux aussi beaucoup à nous offrir. Margaux est ma meilleure amie depuis cinq ans. Ce n'est pas une fille intelligente, elle a souvent des idées stupides et est une vraie tête brulée mais elle sait aussi être généreuse et quand nous sommes ensemble nous nous amusons beaucoup."

     

    Margaux :  "Thérèse...."

     

    Thérèse :  "C'est la raison pour laquelle je conçois qu'être intelligent ou stupide n'est pas un critère recevable pour juger une personne. Il est bien plus intéressant de bien s'entendre avec toutes ceux que l'on rencontre, sans jamais porter d'idées préconçues. J'ai cependant une autre raison pour te détester. Cette manière dont tu as évoqué ta décision de voyager loin de chez toi pendant l'été était la preuve manifeste d'un égo démesuré souhaitant seulement écraser les autres pour imposer son propre mérite"

     

    moi  : "Pardon ? De quoi est-ce que tu parles ? Raconter des souvenirs et des expériences de voyage permet d'instruire les gens que je rencontre. C'est une forme d'éducation. Qu'est-ce qui te dérange là-dedans "

    Thérèse :  "Margaux, toi qui sais que je me rends chaque été plusieurs semaine dans une contrée reculée du monde dans le cadre de mission humanitaire, m'as-tu déjà entendu parler de mes voyages ?"

     

    Margaux :  "Euh... Eh bien, parfois ça arrive que tu glisses un truc dans une discussion qui te rappelle quelque chose sur un coin paumé d'Afrique ou d'Asie mais sinon jamais. Même pas à moi "

     

    Thérèse :  "Comme tu peux le constater, j'ai vécu moi aussi de nombreuses expériences enrichissantes, reprit-elle en reportant son attention sur Romain. Sauf que dans mon cas, je refuse de les utiliser pour me valoriser. A part mes parents ou les gens de leur association, personne de cette société moderne ne comprendra ce que j'ai pu vivre. Ils préféreront me regarder comme une héroïne que je ne suis pas. Or, je souhaite n'être rien de plus qu'une fille ordinaire, avec ses forces et ses faiblesses"

     

    moi :  "Mais tu n'es en aucun cas une fille ordinaire."

     

    La virtuosité de son élocution et la qualité de son argumentation m'ont totalement envoûté. Mon cerveau s'en est déconnecté et ma bouche s'est mise à s'ouvrir seule.

    moi :  "Tu.... Est-ce que tu veux sortir avec moi "

     

    Et voilà ! Non seulement, j'ai démontré à quel point j'étais affreusement orgueilleux mais à cela j'ai rajouté la bêtise. Je n'ai même pas su la regarder une fois ma déclaration faite.

     

     

    Thérèse : "Est-ce que... tu me dragues ? Au beau milieu d'une discussion sans aucun rapport ? Tu n'en as donc rien à faire de l'opinion des autres ? Tout ce qui t'importe, c'est ta petite personne, c'est ça ? Eh bien, mon vieux, laisse-moi te répondre et imprime-le bien dans ta petite tête de mec prétentieux : je ne sortirai jamais avec un garçon aussi insupportable que toi ! Même si tu étais le dernier sur terre, sois bien certain que je refuserai toujours tes demandes !"

     

    Sans me laisser le temps de répliquer, toujours aussi furieuse, Thérèse se tourne vers amis :

     

    "Partons maintenant ! Laissons ce connard à la solitude qu'il mérite "

     

    Ce que j'ai pensé à ce moment-là  ? Je l'ai déjà dit : mon cerveau était incapable de fonctionner. Par la logique, le raisonnement et la rhétorique, mes propres, mon terrible orgueil a été vaincu, jeté au sol sans la moindre pitié. Cette Thérèse est définitivement la personne la plus forte qui soit, bien plus que je ne le serai jamais.

    Sur cette lourde confidence, je vous laisse. A plus tard pour découvrir comment mon orgueil misérablement battu sa fini par se redresser.

    ~~ Ambulando meus magna erit, superbia magis. ~~


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